les fantômes n'ont pas de maison (explicit - maurice)

les fantômes n'ont pas de maison
maurice et mickey
(à écouter pendant la lecture)

la clope écrasée entre ses deux lèvres, l'humeur est à la concentration. yeux plissés, et respiration retenue, l'enjeu semble de taille. mickey blum tente de ne pas pisser à côté de la cuvette qui lui fait face. un, deux, et puis finalement trois. délivrance, le garçon se libère de son offrande en oubliant la mission pour laquelle il oeuvrait. les chutes de yosemite ont de quoi jalouser notre vieil ami. mickey boucle sa ceinture en contemplant le sol et les crasseux dégâts qu'il y a laissé. bordel de merde. le gamin crache son mégot de cigarette dans les chiottes avant de tirer la chasse. à peine sorti du trou à rat qu'il en porte déjà une autre à sa bouche. ses baskets, qu'il fait trainer au sol, collent, s'accrochent au carrelage couleur impure.  il faut croire qu'il n'est pas le seul à avoir marqué son territoire ce soir. les yeux entourés de cernes aux formes qu'on devine beaucoup trop, il s'approche des lavabos. il n'y a pas de savon. il n'y a jamais de savon dans les toilettes des mecs. le miroir lui présente un morceau d'homme dévoré par la fatigue et bouffé par la peur ancestrale de crever. mickey, il a les yeux prêts à exploser et il a soif, trop soif. son haleine, elle emprunte sa saveur à celle de ces bières à premier prix, et à celle de ces foutus marlboro qu'il ne pourra probablement bientôt plus se payer. blum se recouvre la gueule avec un peu d'eau dans l'espoir de peut-être, se réveiller un jour. un râle, rauque, éraillé s'échappe d'un des chiottes au moment où il arrête le robinet. mickey jette un coup d'oeil aux quatre pieds que la porte de l'un des toilettes ne cachent pas. encore ce même pédé. il est là tous les vendredis soirs à hanter les routiers et les quelques gars de passage. toutes ces âmes chagrinées qui s'engouffrent dans l'antre du fantôme du bay's treasure. mickey s'appuie sur le rebord du lavabo et écoute, ô, comment il est bon de croire en l'amour en l'espace de quelques minute. les deux gays grognent, grommellent cette fichue mélodie connue de tous. michael allume alors sa clope tout en s'approchant de la porte, il colle son oreille à celle-ci, les yeux presque clos. n'ont-ils aucun autre endroit à souiller ? aucune maison ? non, et mickey blum le sait mieux que quiconque : les fantômes n'ont pas de maison. les deux hommes se livrent à un duel de gémissement, ça sent le sexe, ça sent le putain de cul. les yeux désormais fermés, les pensées de mickey se laissent rythmer par le son des couilles qui claquent ce fessier, ce son qu'il l'excitait tant, qu'elle aimait tant. il se remémore cette fichue sensation en collant son être entier à la porte, il se remémore ce qu'était ambre poesy. le garçon égare sa main sous son jean bien trop serré. il se branle frénétiquement. à chaque claquement lui vient une image d'ambre : ses lèvres, claquement, ses épaules, claquement, ses phalanges, claquement, son nombril, claquement, ses cuisses, claquement. mickey éjacule rapidement, tristement. les lèvres plissés, le regard empli par la honte il recule en se rhabillant une énième fois. le visage défait, couleur blafarde. il regarde furtivement autour de lui. mickey s'empresse de sortir des chiottes en s'entêtant que sa vie est merdique. il le sait, son aura est de couleur merde.

il s'installe donc à sa place habituelle, au bar. seul. qui voudrait l'accompagner ? qui serait assez fou pour vouloir de sa compagnie, hein ? la musique lui bousillent les oreilles, il écrase sa cigarette dans un cendrier et commande une cinquième bière.