((sippy cup))

Enfant inconnu. Mal aimé, peu aimé, né d’une union adultère. Ses parents mariés, tous deux à une personne différente. Alors il passe ses jeunes années entre les deux. Enfant doux. Il cherche leur tendresse, un regard aimant. Mais s’il a une place à table pour manger, il n’en est pas de même pour leur cœur. Il sait qu’il est là seulement parce que l’avortement n’était plus en option quand on s’est rendu compte de sa présence et on ne peut le jeter dehors. Faut faire avec, pas trop poser de questions, pas trop en demander surtout, au risque de finir à la rue. Sans rien. Peut-être qu’il aurait dû abandonner dès le début.

Il remarque les traitements de faveurs. Ses demi-frères qu’on étouffe d’attention. Lui toujours en arrière-plan. Un décor qui respire, gonfle ses poumons d’air. Une nuisance. Une silhouette qui fait changer de pièce, détourner le regard au milieu du couloir.

Et Romi, il grandit, il prend de la hauteur. Continue à être ballotté entre les deux. Il perd de sa candeur, de cet éclat dans les yeux. Plus besoin d’attendre. Alors il a cessé d’espérer. Il a tût ses espoirs de se voir reconnu à sa valeur par eux. Il décide de vivre par lui-même, sans personne d’autres, sans rien devoir à qui que ce soit.

La majorité à peine atteinte. Il laisse tout. Ils peuvent tous aller au diable, il ne cillera plus devant eux, ne quémandera plus leur amour comme un simple mendiant. Ses prunelles se posent une dernière fois sur cette illusion de famille. Quelques économies en poche. Il décide de ne plus chercher à leur plaire. Il n’a jamais compris jusque-là, qu’il pouvait exister sans eux.

Bleu, noir, rouge. Les traces d’encre sur ses doigts fins. Dans un petit atelier de bonne fortune, il profite de ce don que les cieux lui ont insufflé. Il dort sur le canapé, travaille sur le canapé posé deux mètres plus loin. Pour certains, ce n’est pas une vie, mais lui ça lui convient. Il a sa première petite-amie, une cliente au début, c’est elle qui l’aide, fait connaitre son petit salon. Les mois passent ainsi. Romi tombe aussi dans des affaires plus louches, moins légales mais qui rapportent plus, ça lui convient. Bel appart, belle voiture, sublime petite-amie. C’est comme si l’espoir renaissait.

Mais ça ne dure jamais avec lui. Il ne sait pas qui est contre lui, parce qu’elle finit par disparaitre elle aussi, un soir. Il se souvient de la pluie battante, il avait une surprise pour elle et la urgeait d’arriver et il s’en est fallu d’une simple inattention pour que son corps éclate contre un camion, à l’hôpital elle était méconnaissable, sans vie.

Peut-être est-ce une façon de demander pardon, une bonne action, mais il n’hésite pas à amener cet homme sous son toit. Il sait ce que c’est, de ne plus rien avoir.